lundi 20 juillet 2009

En ces temps là j'avais 20 ans


Malgré mon exil yéménite, Pierre Bachelet reste tout de même un passage obligé. Normal. Promis, je n'épiloguerai pas sur le symbole du pseudo-cap des 20 ans, pas d'épuisante tirade prétentieuse, chiante, banale et donc inutile. Donc ça, c'est fait. Je profiterai plutôt de l'occasion pour vous décrire les différentes options qui s'offrent aux occidentaux en mal de sensations bien peu haram.

Le Yémen a beau être un pays accueillant, ne délirez pas non plus: l'accès à l'alcool, aux drogues ou à tout autre instrument de perdition reste fortement prohibé. Votre seule et unique chance de vivre à l'occidentale (non, je n'ai pas dit dépravée), paradoxalement, est d'aller vers la population yéménite. Par aller vers la population, j'entends se lier d'amitié avec des yéménites; je doute qu'aller vers un quidam et lui demander du haschich soit une bonne idée. Vous pourriez malencontreusement tomber sur un légaliste, et dès lors apprendre à vos dépends que tout voyageur est soumis à la loi islamique.

Ces liens d'amitié pourraient, à l'inverse, vous amener à fréquenter un restaurant chinois caché sous un supermarché. Qui n'a de chinois, et de restaurant, que le nom. Pour des prix avoisinants les tarifs européens, vous pourrez alors assouvir vos pulsions, éthyliques ou autres. Toutefois, dans le souci de préserver votre intégrité physique, je vous conseille sérieusement de fumer/boire en privé.

Enfin, l'autre possibilité est de fréquenter un institut où l'on enseigne l'arabe. Non pas que l'institut en question soit un repaire de dépravés. L'avantage de l'institut est plutôt d'offrir la possibilité de rencontrer des gens de tous horizons.

Eventuellement des Marines américains. Qui vous ouvriront les portes de l'ambassade américaine pour participer à un barbecue avec les Marines en poste à Sana'a. Si vous en avez la possibilité, foncez. C'est l'occasion de voir qu'aujourd'hui encore, on construit des chateaux forts. l'ambassade américaine étant un modèle du genre. Construite sur 200 ou 300 mètres, cachée derrière un imposant mur d'enceinte, le long d'une rue barricadée, entre deux ponts levis (true story) qui se referment autour de toute voiture entrante pendant la vérification des papiers. De part et d'autre de la rue, des jeeps en mode camouflage avec mitraillette intégrée, bardées de soldats yéménites dans des treillis jaunes et marrons particulièrement seillants. Une fois passées ces formalités, on franchit un mur de 10 mètres pour finalement atteindre l'ambassade, 300 mètres derrière le mur en question. Bref. J'ai donc eu l'honneur de participer à une soirée barbecue dans la maison des Marines US. Ambiance franche camaraderie, très mâââle en fait, lumière tamisée, très alcoolisée, très bizarre. Mais marrant. Confirmation que la bière américaine est bel et bien dégueulasse. On pourrait résumer la soirée en une phrase : une bande de soldats dans tout ce que la condition peut avoir d'obtus, lourdingues au possible, ivres au possible et excessivement proches les uns des autres (le terme exact semble être : "beauf"), vous excluant de fait de l'ambiance. Heureusement, certains dérogeaient à ces raccourcis un peu faciles, faisant de cette première partie de soirée une expérience...amusante.

Acte 2. Après cette première étape, départ pour une boîte russe. Normal. Là encore, russe dans tout ce que le mot peut susciter de glauque dans l'imaginaire commun. Plus de prostituées que de clients, une piste de danse aux multiples poteaux de strip-teaseuse, une lumière rouge over-tamisée, une espèce de tapisserie horrible en velours, une odeur insistante de vodka. Ne manquaient que les marchands d'armes. En effet, en plus des quasi-esclaves somalo-éthiopiennes, le club rassemble, en vrac : quelques vieilles croûtasses européennes en manque de sexe, des gigolos yéménites au déhanché incertain, et plusieurs immondes pervers étrangers, jetant sur la population féminine un regard invariablement lubrique à faire frissonner (puis vomir) les plus cyniques d'entre nous. Ajoutez à cela une musique genre années 80. Et vous obtenez un cocktail type Günther en mode non autodérision.

Conclusion : le Yémen est définitivement un pays aux ressources improbables, où vous pourrez organiser une soirée depuis un restaurant chinois jusqu'à une boîte russe, en passant par une soirée chez les Marines, entre business, "force vive mais aveugle" et débauche...

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